Des neurones impliqués dans la perception des caresses limitent l’emballement de la réponse immunitaire

L’équipe Inserm/CNRS/Aix-Marseille Université de Sophie Ugolini au centre d’Immunologie de Marseille-Luminy (CIML), en collaboration avec le laboratoire d’Aziz Moqrich à l’Institut de Biologie du Développement de Marseille (IBDM), a montré que la molécules TAFA4, produite dans la peau par des neurones impliqués dans la perception de caresses, possède des propriétés anti-inflammatoires et cicatrisantes remarquables. Cette découverte pourrait avoir des applications thérapeutiques intéressantes dans les maladies où un emballement du système immunitaire et une hyper-inflammation sont responsables de lésions sévères, par exemple dans les formes graves de COVID-19.

L’équipe s’est intéressée au rôle des neurones sensoriels qui sont activés suite à l’inflammation induite par un coup de soleil. Outre le fait qu’ils initient la transmission d’un signal « d’alerte » jusqu’au au cerveau, se traduisant par la perception d’une douleur, les chercheurs ont montré que ces neurones sont aussi capables de limiter localement les mécanismes d’inflammation en régulant la réponse immunitaire. Plus précisément l’équipe a montré qu’une sous-population de neurones innervant la peau, des neurones également impliqués dans la perception des caresses, sécrètent une molécule appelée TAFA4 qui agit sur les cellules immunitaires de la peau. Ces cellules immunitaires, appelées « macrophages », sont activées en cas de lésion et jouent un rôle majeur dans la génération d’une inflammation mais aussi dans la mise en place des processus de réparation et de cicatrisation.

Guillaume Hoeffel, chargé de recherche Inserm, et Guilhaume Debroas, doctorant dans l’équipe, ont montré qu’une déficience génétique en TAFA4, conduisait à un défaut de réparation de la peau exposée aux rayons Ultraviolet (UV) et à une inflammation persistante. L’étude des mécanismes impliqués a montré que cette voie de régulation neuro-immune basée sur la production de TAFA4 par les neurones sensoriels, permettait de limiter les dommages liés à une inflammation excessive en stimulant en particulier la production d’une autre molécule anti-inflammatoire, l’interleukine 10 (IL-10), par des macrophages dits « réparateurs ». Cette voie, impliquant TAFA4 et l’IL-10 favorise donc la résolution de l’inflammation et la réparation du tissu lésé.

Ainsi, de manière inattendue, les neurones impliqués dans la perception d’une sensation agréable suite à une caresse, sont donc également capables, si la peau est lésée, d’apaiser l’inflammation locale et de limiter l’emballement de la réponse immunitaire en produisant la molécule TAFA4.

Les perspectives thérapeutiques de cette découverte pourraient être très larges. En effet, TAFA4 pourrait être utilisée à chaque fois que le système immunitaire s’emballe de manière inappropriée comme par exemple, dans les maladies auto-immunes, la COVID-19 ou le choc septique… Ce potentiel thérapeutique est aujourd’hui à l’étude dans l’équipe.


Publication :
Sensory neuron-derived TAFA4 promotes macrophage tissue repair functions. Guillaume Hoeffel*, Guilhaume Debroas*, Anais Roger, Rafaelle Rossignol, Jordi Gouilly, Caroline Laprie, Lionel Chasson, Pierre Vincent Barbon, Anaïs Balsamo, Ana Reynders, Aziz Moqrich & Sophie Ugolini. Nature (2021). 594(7861):94-99. doi: 10.1038/s41586-021-03563-7 : https://rdcu.be/ckUYr

See also an Highlight article in Nature reviews Immunology: https://rdcu.be/cmysj

Voir aussi : Ces travaux ont aussi été relayés sur le site de l’Inserm: https://www.inserm.fr/actualites-et-evenements/actualites/proteine-anti-inflammatoire-et-pro-cicatrisante-produite-par-neurones


Contacts :
Sophie Ugolini
E.mail :ugolini@ciml.univ-mrs.fr

 

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Légende de l’image : Neurones sensoriels de la peau (en rouge et jaune) en contact étroit avec des macrophages (en bleu). Photo prise à partir d’analyses réalisées en microscopie confocale, Pierre-Vincent Barbon.